Hestia – Sakina et Cyril Aveline

clamy-grandidier
19 août
4 min de lecture

« Hestia, la table où le temps et le produit reprennent sens »

Au cœur du port de Bormes-les-Mimosas, une adresse s’est imposée en peu de temps comme un refuge pour les amoureux du goût : Hestia, le restaurant de Sakina et Cyril Aveline. Plus qu’une table, une histoire de résilience, de passion et de transmission.

Quand la cuisine devient une planche de salut

Pour Cyril, la cuisine n’est pas seulement un métier : c’est une nécessité vitale. « Ma passion vient du plus profond de mes tripes. D’une certaine manière, la cuisine m’a sauvé. Elle m’a donné non seulement un but mais aussi un moyen d’expression », confie le chef.

Cette détermination est née d’une épreuve. Après un grave accident de moto, les médecins lui annoncent qu’il doit abandonner les fourneaux. Lui choisira l’inverse : plonger corps et âme dans la haute gastronomie.

De la haute gastronomie à son propre restaurant

Sa carrière démarre dans les cuisines exigeantes du Chalet Mounier, avant de rejoindre le Mas Candille à Mougins sous la houlette du chef étoilé Serge Gouloumès. Très vite, Cyril se confronte à l’excellence et affine ses gestes.À Paris, il intègre la brigade de Michel Rostang, où il reste près de deux ans. Puis cap sur les États-Unis : à Los Angeles, auprès de Christophe Emé, il participe à décrocher une étoile Michelin.

De retour en France, il gravit encore un échelon en devenant premier sous-chef à l’Epicure, aux côtés du chef triplement étoilé Éric Fréchon. Deux années au cœur d’une des cuisines les plus prestigieuses de Paris l’arment définitivement.

En 2011, il décide de voler de ses propres ailes. À la tête de Les Bistronomes, rue de Richelieu, il impose un style personnel : une gastronomie d’auteur dans un format accessible. Le succès est immédiat : en moins de huit mois, le guide Lebey l’élit Meilleur bistrot de Paris 2012.

Après cette aventure, Cyril poursuit sa route en tant que chef des hôtels Amour et Grand Amour, puis comme consultant pour de nombreux établissements parisiens. En 2021, l’appel du Sud et une opportunité inattendue ouvrent un nouveau chapitre : avec Sakina, il fonde Hestia, dans un petit port méditerranéen qui devient leur terre d’ancrage.

Le vin comme langage universel

L’univers de Sakina est autre : celui du vin. « Ce qui m’a fascinée, c’est l’histoire. Pourquoi appelle-t-on cela un Gevrey-Chambertin ou un Saint-Amour ? Chaque bouteille raconte à la fois un savoir-faire, une géographie, une géologie, une tradition », explique-t-elle. Après un parcours d’enseignante en histoire-géographie au Qatar et au Cambodge, elle revient en France, se forme en sommellerie et apprend aux côtés de Marco Pelletier chez Vantre. Chez Hestia, elle construit une cave de plus de 150 références, sans carte figée, où le dialogue remplace la liste imprimée.

Une philosophie claire : rigueur et bienveillance

Le couple partage une vision de la gastronomie à la fois exigeante et humaine. « Le monde de la gastronomie change en permanence. Nous devons nous adapter sans renier nos valeurs. Notre rôle est aussi pédagogique : faire naître chez nos clients une conscience du temps, du produit et de la bienveillance », soulignent-ils.

En cuisine, Cyril Aveline s’approvisionne à moins de 200 km, directement auprès de maraîchers et pêcheurs locaux. « Nous privilégions une pêche méditerranéenne sauvage et des fruits et légumes cultivés sans traitement. La saisonnalité est notre guide », reconnaît le chef.

Parmi les créations signatures, un produit populaire occupe une place à part, quand c’est la saison : l’artichaut gros du pays, cuit deux fois, dont une à la braise, et servi avec une sauce ravigote au soja. « C’est un souvenir d’enfance, un produit humble que nos clients adorent. »

Hestia, une maison conviviale

Sakina et Cyril Aveline voulaient un lieu à leur image : élégant mais sans rigidité. « Nous venons du monde étoilé mais nous refusons cette distance entre la salle, la cuisine et le client. Ici, on s’assoit à table avec eux, on se met à leur niveau, on tutoie, on casse les codes », raconte Sakina Aveline.

L’ambiance est intime : bois, pierre, argile et lumière tamisée composent un décor chaleureux. La flamme, présente en cuisine comme dans l’esprit du lieu, en est le symbole.

Des projets ancrés dans la durée

Pas question pour eux de courir après une expansion effrénée. « Nous n’avons pas d’ambitions à grande échelle. Nous voulons asseoir la réputation d’Hestia, enrichir la cave qui compte déjà 150 références, poursuivre notre changement de carte hebdomadaire et participer à des manifestations associatives autour de la gastronomie », affirment-ils.

À Bormes-les-Mimosas, Hestia incarne une nouvelle forme de gastronomie : exigeante, mais accessible ; rigoureuse, mais joyeuse. Une maison où chaque assiette et chaque verre deviennent une rencontre, un récit et une invitation au partage.